jeudi 17 mai 2012

De la pertinence du bricolage chez Nounou : Où commence la douce violence ?

Lorsque j'ai proposé mon dernier post présentant des idées de bricolage pour la fête des mères sur la page Facebook du blog, nous avons eu avec une collègue assistante maternelle, un début d'échange très intéressant sur le thème de la douce violence. En effet, pour reprendre les mots de cette personne, on nous dit parfois que le fait de prendre la main de l'enfant et de l'apposer dans de la peinture ou pâte fimo, peut être considéré comme de la "douce violence" puisque celui-ci n'est pas dans la demande ou dans la possibilité de répondre à nos consignes. Du coup, cette jeune collègue ne pratique plus ces prises d'empreinte des mains pour faire un petit souvenir aux parents de peur qu'effectivement cela s'apparente à de "la douce violence".

J'aurais beaucoup aimé que d'autres personnes viennent nous donner leur avis sur la question mais malheureusement, nous sommes restées un peu seules avec notre questionnement. Si notre conversation n'a pas eu un franc succès, c'est peut être tout simplement que de nombreuses collègues assistantes maternelles ne connaissent pas encore ce terme de "Douce Violence".

Donner une définition claire de ce concept n'est pas si aisé que cela car, et c'est bien là le coeur du problème, cela dépend beaucoup de la subjectivité de chaque personne. On peut néanmoins dire qu'on appelle "Douce violence "tous les gestes inappropriés, toutes les pratiques, toutes les paroles imposées à l’enfant, sans le prévenir, souvent dans le but de privilégier les intérêts propres du professionnel par rapport aux intérêts de l'enfant. Tout cela n'est pas réalisé dans le but de faire mal à l'enfant, bien souvent on pense même le faire "pour son bien". Cela représente toujours un contrôle et une domination de l'adulte sur l'enfant qui impose quelque chose parfois contraire au développement du petit. Parmi les douces violences repérables dans les pratiques professionnelles et qui ne laissent que peu de place à la polémique, on peut noter :
  • réveiller un enfant qui dort ou ne pas le coucher parce que ce n'est pas l'heure
  • dire à un enfant qu'il est méchant ou vilain
  • obliger un enfant à manger
  • critiquer un parent devant son enfant........
Il y a aussi toutes celles que je réalisais au début de mon activité en pensant bien faire comme par exemple mélanger tous les ingrédients dans l'assiette de l'enfant sans qu'il en ait fait la demande (je pensais comme cela camoufler le goût de certains aliments, or  je me rends compte maintenant que c'est nuire à l'apprentissage des goûts et renier le droit de l'enfant de préférer ou de refuser certains aliments.

Là où ça se complique, c'est lorsque ce qui a été repéré comme étant potentiellement de douces violences sont en fait pour vous des actes de bientraitance au contraire comme par exemple chez moi, tout ce qui rentre dans des rituels créés pour aider l'enfant à se repérer dans le temps et dans l'espace comme ranger les jouets un peu avant l'arrivée des parents ou bien toujours avoir la même place à table. C'est là que la subjectivité de chacun entre en jeu.

Pour vous faire une idée, je vous invite à parcourir le site  http://douceviolence.free.fr/  qui lui-même vous emmènera vers de possibles lectures sur le sujet.

Qu'en est-il de notre empreinte alors ? Une chose est sûre. L'enfant lui, n'a rien demandé. Il subit sans possibilité de refuser un acte qu'il ne comprend pas, qui n'a aucun intérêt pour lui et qui n'est franchement pas d'une utilité incontournable pour son développement. Mais faut-il aller jusqu'à dire qu'il s'agit d'une "douce violence" ? Personnellement je n'aime pas réaliser ce geste. Si on cumule le fait de contraindre l'enfant et le coup de stress que cela me provoque en pensant que le bébé va peut être avoir la brillante idée de préférer porter la main à sa bouche, je ne vois de plaisir nulle part, sauf peut être, plus tard, dans les yeux de la maman qui va recevoir le présent ! D'ailleurs en réfléchissant, je m'aperçois que depuis que je ne fais plus participer les bébés aux séances de bricolage des grands, je ne fais plus d'empreinte de la main mais plutôt du pied que je réalise au cours du soin/change en l'intégrant à un petit massage sans trop perturber donc, le rituel du change.

Toutefois, je n'irais pas jusqu'à inciter mes collègues à ne plus réaliser ce geste lorsqu'il n'est qu'occasionnel. Je ne pense pas que le fait d'avoir trempé, sans consentement préalable, une fois ou deux la main dans la peinture va faire de l'enfant une rente à vie pour son futur psy. Je préfère de loin les amener à s'interroger de manière plus générale sur l'utilité de faire réaliser des "bricolages" à des tout petits de moins de 2 ans. A mon sens, c'est plutôt là que se situe la douce violence. Je suis toujours gênée quand je vois sur des photos des enfants coincés dans des chaises hautes en train de barbouiller une feuille "aidés" de façon très directive par leur nounou. Je me demande vraiment ce que peut en retirer l'enfant et surtout je pense à toutes les choses beaucoup plus intéressantes pour son développement, qu'il aurait pu réaliser pendant ce temps là. 

C'est vrai que souvent, les parents sont demandeurs d'oeuvres d'art à rapporter à la maison, histoire d'avoir la certitude que le petit ne s'est pas ennuyé chez Nounou. Les assistantes maternelles elles-mêmes, dont moi quand j'ai débuté dans la profession, peuvent avoir l'impression qu'elles ne pourront pas montrer aux parents qu'elles ont travaillé si il n'y a pas de preuve matérielle. Heureusement pour moi, très vite lors de mes recherches sur le net, je suis tombée sur un texte écrit par Josée Lespérance qui vous explique en détail qu'il n'en est rien et qui vous donne des pistes pour vous "désintoxiquer" du bricolage. Le texte se trouve là : 


Vous remarquerez que l'on parle là d'enfants de 18 à 24 mois. Vous jugerez de vous même ce que l'on peut penser du bricolage chez les petits de moins de 18 mois !!